Mes mediologues
Partager l’article dans Twitter
Vous savez a quoi ressemblent les barrieres metalliques installees par la police pour encadrer nos manifs ? Desormais, votre sont les mecs de gauche que les font mettre en place, observe notre mediologue, Jean-Yves Chevalier. Voila le point de vue.
J’habite pourtant un bon eleve. Je ne me deplace qu’a velo (pas, a vrai dire, par amour Afin de des « mobilites douces » mais parce que des bus n’avancent plus). Je dechiffre consciencieusement la lettre paroissiale que m’envoie ma mairie d’arrondissement. J’ai d’ailleurs du mal. « Une fin d’annee solidaire Afin de tout te s », me recommande-t-on, en titre. J’acquiesce, bien sur sites des rencontres geek gratuits, mais le « t » a Notre fin de « tout » me pose des problemes.
D’autant que, par ailleurs, on m’annonce la refection d’une place de maniere a la rendre plus « attractive concernant tou te s des usager e s ». Ce n’est jamais que je prefere la refection d’une place a une fin d’annee solidaire, mais je comprends mieux le « tou te s » une seconde formulation puisque je peux y lire l’ensemble de et tous. Y aurait-il des fautes d’orthographe inclusive ?
En attendant la refection des places, les elus parisiens s’adonnent donc a J’ai refection d’une langue, ainsi, je comprends que c’est pour eux une lourde tache. Personnellement, les bribes de grammaire que j’ai acquises dans une ecole alors populaire du meme quartier, on voit vraiment longtemps Il semble vrai, m’empechent d’apprecier comme il conviendrait une telle ?uvre d’importance. Une remediation est vraisemblablement necessaire et peut-etre viendra moyen d’un stage de reeducation ou on m’apprendra a me deprendre des formes anciennes d’une langue coupable, pourtant inscrites dans des livres ayant eclaire mes ri?ves.
Laideur consensuelle
Notre redaction en prose municipale devra etre, dans ces conditions, une occupation a enormement moment qui contraint des elus a laisser tomber en jachere des initiatives originales un temps libre mises c’est parti. Ainsi du debarquement, au premier confinement du printemps 2020, de barrieres – arrimees entre elles et fixees au sol – destinees a empecher le stationnement automobile, dans la petite rue Brezin, proche d’la mairie du XIVe arrondissement. Vous connaissez, les barrieres metalliques installees par la police pour encadrer des manifs. Un vrai marqueur de gauche, ces barrieres, sauf que, auparavant, ce n’etaient pas les mecs de gauche que nos faisaient mettre en place.
Une pancarte accrochee a une barriere indique au passant que tout ceci reste fera pour le beaucoup : « Pietons, naviguez ici plus sans stress ». C’est un tantinet Complique a croire, puisqu’on ne va nullement descendre du trottoir pour y remonter plusieurs metres plus loin. Ou alors Cela reste prevu de marcher une jambe sur la chaussee, l’autre concernant le trottoir, penche comme via 1 voilier, c’est peut-etre la raison de l’emploi du terme « naviguez ». Surtout, nos barrieres empechent de traverser la rue (certes en dehors des passages cloutes mais on reste en France) sauf a profiter des deux bateaux – entrees charretieres, dit-on parfois joliment – qui ne semblent malheureusement pas situes de maniere symetrique dans un magasin. Un vrai mur de Berlin entre nos numeros pairs et nos impairs, deux cotes d’la rue devenus etrangers.
Appuyees sur les barrieres ont ete installes des bacs, a mi-hauteur, avec certains plantes vertes et courageuses. Dix-huit mois prochainement, l’ensemble reste toujours la. Rien n’a bouge. Telle une troupe qui fera une sortie puis regagne son campement, les ediles n’ont apparemment plus donne signe de life. Le terrain a ete abandonne, tel apres un sinistre, Lorsque l’on laisse bien en l’etat en attendant l’expert de l’assurance. Quelques barrieres ont ete descellees une chaussee et ont retrouve leur liberte, des plantes ont survecu, opiniatres et malingres. Mes commercants en rue seront sans nouvelles et leur patience suscite l’admiration generale. La laideur de l’ensemble fait consensus, mais on ne va jamais se formaliser Afin de si peu.
Qui crois a toutes les livreurs ?
Si peu ? J’accorde qu’il y a a Paris et ailleurs des problemes plus graves. L’amenagement des rues reste du ressort de la municipalite, des riverains paraissent des electeurs, ils recoltent ce qu’ils ont elu. Cela n’est pourtant inutile d’etre semiologue pour comprendre que les petites choses pourront avoir du sens et paraissent plus revelatrices qu’il n’y parait. Revelatrices, ici, d’une obsession, l’« amenagement de l’espace » et d’un aveuglement a ceux qui y travaillent. Etant donne qu’il convient de s’interesser aux principales « victimes » de cet amenagement sauvage. Ce ne semblent pas les riverains, nos habitants du quartier, nos promeneurs.
Les « victimes » n’habitent pas Paris et n’y votent jamais. Ce paraissent d’abord les livreurs, contraints de s’arreter sur les fameux bateaux parfois quelque peu eloignes de l’adresse de livraison pour ensuite revenir deposer des colis eventuellement volumineux. Cela n’y a plus pour eux l’option de stationner au milieu de la rue (quitte a se Realiser houspiller), car il faudrait alors passer au-dessus des barrieres et le 110 metres haies n’a jamais ete couru a toutes les Jeux olympiques avec des paquets dans les bras. C’est grand, les livreurs, on n’y pense pas. Les eboueurs, on n’y crois pas non plus. Eux doivent contourner des barrieres, se saisir des poubelles, des trainer dans le trottoir, trouver un passage et repasser au camion Afin de nos y deverser.
Sens des priorites
Pas grave ? Regarde qui tu oublies, je te dirai qui tu es. Mes militants de l’ancien monde ne savaient jamais que la langue est fasciste mais ils connaissaient la penibilite de travaux qu’ils avaient desfois eux-memes effectues. Ils s’attachaient a defendre ceux qui exercaient des metiers difficiles, ils ne leur pourrissaient pas la vie, ils n’etaient nullement pour eux la gauche cauchemar. Mes barrieres d’la rue Brezin sont les symboles de la separation en nouvelle gauche et des classes populaires qui se traduit au sein des miserables pourcentages que promettent les intentions de vote.
Des gens de gauche, vraiment, qui, hantes par la noble mission qui est la leur (sauver la metropole, la planete, effacer partout les traces de ce qui leur reste insupportable) ignorent a votre point l’existence de ceux a qui ils imposent des consequences de leurs decisions ? La fumee des camions, qui les effraie, leur cache les conducteurs des camions qui n’ont pas reclame qu’on deconstruise la langue mais qu’on respecte un travail.